un article de notre camarade Roland (émigré dans les Vosges)
Que penser de la manifestation « La fraternité à son ZENITH » du 27 septembre ?
Bien
que soutenant Ségolène Royal et sa motion, je n?ai malheureusement pas
pu me rendre au Zénith. Je me suis néanmoins intéressé à ce que les
médias en ont relaté, notamment sur les réactions des responsables
politiques.
Voici en résumé ce que j?ai pu lire ou entendre :
Les jugements négatifs et critiques :
-
Xavier Bertrand (le 29 sept nouvelObs) ironise sur le mot fraternité et
affirme que « la politique c?est du fond plus que de la forme »
-
Henri Emmanuelli (le 29 sept nouvelObs) pense que « la politique n?est
pas un show?Tout ça n?est pas sérieux, cette vision de la politique,?
qui néglige le fond, ce genre de cérémonie qui est entre le
show-business et le rassemblement de secte ». Il parle aussi de «
personnalisation à outrance »
Les jugements évasifs ou comparatifs :
-
Bertrand Delanoë (le 29 sept nouvelObs) affirme « Chacun fait les
choses selon son style, nous ne sommes pas tous identiques. Moi, je
fais mon travail, je suis quelqu?un de naturel qui ne se met pas en
scène? Je n?ai pas besoin d?aller au Zénith pour être fraternel »
-
Martine Aubry (le 29 sept nouvelObs) préconise « le débat d?idées et la
confrontation au sein du PS. Chacun son style : je préfère être avec le
parti et les militants?Mon opposant à moi, c?est Nicolas Sarkozy, pas
Ségolène Royal. »
- Pierre Moscovici (l?Est Rép du 3 oct) affirme «
ce n?est pas un problème de fond, mais de forme ; je peux signer sa
motion, mais être à la Fête de la Fraternité au Zénith, non ! »
Les jugements
positifs, encourageants ou approbatifs :
-
François Bayrou (sur BFM le 28 sept) : « Le style, chacun en juge. Moi,
je trouve qu?elle est courageuse, et j?aime bien les gens qui se
battent »
- Dominique de Villepin (la Croix du 3 oct) : « Ségolène
Royal ne fait pas comme avant. Or, c?est important en politique
d?essayer de nouvelles attitudes, de nouveaux discours, de nouvelles
façons d?entrer en communication avec le citoyen ».
- Jean-François
Kahn (sur BFM le 2 oct) : « Je suis très surpris, parce que j?ai lu les
journaux et j?ai lu que c?était ridicule, télévangéliste?Moi, j?ai cru.
Et depuis, j?ai vu, j?ai vu la vidéo. Eh bien, ce n?est pas vrai ! On
est pour ou contre politiquement, mais elle s?était transformée en bien
!...Alors, pourquoi cette réaction de la presse ?
- Jean-luc
Mélanchon (sur son blog) : « Le zénith de Ségolène Royal ! Où est le
problème ?...Le problème, c?est qu?on crée ce type de problème à ce
sujet. Mais, s?il doit y avoir un pr oblème c?est plutôt de constater
qu?elle a parlé pendant une demi-heure et que ce qu?elle a dit n?est
relaté nulle part »
-
Vincent Peillon (sur BFM le 29 spt) : « je trouve même qu?elle incarne
pour nous tous quelque chose d?agréable, plutôt moderne, plutôt ouvert,
plutôt souriant. Ce n?est pas parce qu?on fait de la politique qu?il
faut être désagréable, acrimonieux et revanchard? Quand quelqu?un a du
talent, voire un peu de courage,? il faut l?aider? »
- Patrick
Allemand, 1er Vice-président du Conseil régional de PACA, signataire de
la motion de Ségolène Royal (sur son blog) : « Je suis convaincu que ce
type de communication nous fait entrer dans la politique du 21 ème
siècle? Pour moi, le Zénith représente l?ouverture d?une porte vers le
peuple qui ne se reconnaît plus dans nos rites qui apparaissent
désuets?Il n?y a là aucune dérive sectaire, mais une recherche
constante d?une nouvelle manière d?attirer les gens à la politique et
de développer la citoyenneté q ui débouche sur un évènement politique,
mais également festif et culturel »
Quelle conclusion tirer de toutes ces réactions ?
Ségolène
Royal ne laisse personne indifférent, soit elle agace, soit elle
enthousiasme. Il suffit de se rendre sur les blogs et les journeaux en
ligne et lire les commentaires pour se rendre compte que les
appréciations sont très contrastées, souvent même injurieuses à son
égard ou au contraire très élogieuses. Il y a aussi chez elle comme de
la provocation, puisqu?elle rit de ces critiques et de ces attaques
personnelles se référant à Cyrano de Bergerac qui disait avec panache :
« On n?abdique pas l?honneur d?être une cible. »
Sur le fond de la
manifestation et de la prestation de Ségolène Royal, les médias en ont
très peu parlé, alors qu?il y a eu des messages politiques très
importants. Faire scander le mot fraternité et dire « que c?est mieux
que la solidarité », ce n?est nullement anodin ni risible, comme
affirmer « que la polit ique sert à quelque chose, qu?on peut (grâce à
elle) répartir autrement les richesses, augmenter les pensions des
petits retraités, s?occuper des quartiers, remettre des médecins dans
les campagnes, donner de l?avenir aux jeunes, faire respecter le
travail dans les entreprises, mettre en place un autre système
financier qui soit au service de l?économie qui soit au service des
hommes, interdire les délocalisations, dire que la gauche : c?est le
changement, que la gauche doit rassembler, construire etc (le discours
de Ségolène Royal est sur le site de Désirs d?Avenirs :
http://www.segoleneroyal2007.net/ ).
Il y a donc eu au Zénith un message politique très fort. C?est très
original et nouveau de l?avoir fait passer dans le cadre d?une
manifestation festive et si agréable d?après ceux qui ont pu y
participer. Que les médias ou un homme de droite comme Xavier Bertrand
minimisent ce message en l?occultant, c?est compréhensible et assez
habituel, mais qu?Henri Emmanuelli affirme que « tout ça n?est pas
sérieux, que c?est une vision de la politique qui néglige le fond? »
est faux et inadmissible de la part d?un responsable socialiste. C?est
aussi profondément choquant et, à mon avis, même injurieux à l?égard de
Ségolène Royal et de tous ceux qui la soutiennent et qui n?ont pas pour
cette raison l?impression d?avoir adhérer à une secte.
La
forme ou le style de la manifestation du Zénith, ont été contestés,
surtout à gauche. Je pense, comme Patrick Allemand, que Ségolène Royal
a mis là en œuvre une « nouvelle manière d?attirer les gens à la
politique et de développer la citoyenneté ». Cette manière ressemble à
sa démarche participative : elle prend en considération la parole des
autres, se veut proche des problèmes des gens, met en pratique et
invente un type de relation et de communication qui ne soit pas
qu?intellectuelle. Traditionnellement, le leader ou le responsable
politique est celui qui sait ou croit savoir, qui est un expert croy
ant avoir trouvé la solution pour nous les simples citoyens, parce
qu?il a l?expérience du pouvoir ou qu?il a été élu pour nous
représenter et en somme décider pour nous. Ségolène Royal, dans ses
discours, mais aussi dans son comportement, par ses initiatives et ses
actions, met en cause ce type de fonctionnement. Sur internet, dans un
commentaire, j?ai été surpris que l?on critique Ségolène Royal, parce
qu?en « voulant à elle seule incarner la modernité, elle ringardise
ainsi un peu plus le Parti socialiste ? alors qu?il y a dans ce parti
des personnes aussi ouvertes qu?elle?qui évitent de jouer ce jeu-là ».
On ne comprend pas cette conception nouvelle de faire de la politique
et on reproche ainsi à Ségolène Royal comme l?a fait Henri Emmanuelli «
une personnalisation à outrance ». L?animosité de Rocard, Jospin,
Aubry, Fabius et autres « éléphants » vient aussi à mon avis de là.
Ségolène Royal fait trop figure de modernité face aux anciens qui ont
du mal à se remettre en cause et à comprendre pourquoi nos concitoyens
ont tendance à rejeter la politique et à ne plus faire confiance aux «
politiciens »qui sauraient et qui sont mal perçus?
Je
ne renie nullement le travail que Jospin, Fabius, Aubry, Strauss-Kahn,
? ont fait, ni les avancées sociales qu?ils ont mis en œuvre, quand ils
étaient au pouvoir. Je souhaite qu?ils continuent à œuvrer au sein du
PS, car leur expérience est utile et ils n?ont pas renié les valeurs de
la gauche. J?espère cependant qu?ils comprennent que la démarche de
Ségolène Royal est vraiment utile et nécessaire pour la survie d?un PS
et pour qu?il redevienne attrayant, ouvert et moderne. Je souhaite
aussi qu?ils ne rejettent plus ce « style » ou cette forme, qu?ils en
débattent en toute fraternité avec Ségolène Royal pour adopter une
démarche plus collective, ne la laissant plus « être la seule à vouloir
moderniser le PS, risquant ainsi de le ringardiser encore plus ».
Roland Dellinger